« Nous jonglons avec une législation et une réglementation inadaptés aux copropriétés dégradées »

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Dans la nuit du 15 au 16 décembre, dix personnes, dont cinq enfants, sont mortes dans un incendie à Vaux-en-Velin. Ce drame met en lumière un mal méconnu : l’impossible droit à un logement digne et sécurisé dans l’habitat privé dégradé.

Face au principe de copropriété et sa loi de 1965, l’action publique et les moyens mobilisables se trouvent bien souvent dans l’impasse, alors que des copropriétés privées sont dans un état d’urgence parfois absolue. Et les pouvoirs publics accusent un éternel train de retard vis-à-vis des multiples difficultés de ces copropriétés.

Le drame de Vaulx-en-Velin en est un tragique cas d’école, et des dizaines de copropriétés semblent sur cette pente glissante. Un phénomène sur lequel la Fondation Abbé Pierre alerte, depuis des années, sans que des dispositifs à la hauteur soient déployés pour lutter contre cette fabrique de la pauvreté. Un comité de pilotage du « plan initiative copropriétés » s’est néanmoins tenu le 16 janvier au ministère de la cohésion des territoires.

Sous le seuil de pauvreté

La mécanique est souvent la même : des propriétaires de bonne foi quittent leur copropriété avec le sentiment de payer des charges plus élevées pour moins de services. Ils sont remplacés par des copropriétaires impécunieux ou peu scrupuleux. Puis des chaînes délictuelles de location et de sous-location s’installent : alors que ces copropriétés sont souvent le dernier recours avant la rue, le mal-logement, et les marchands de sommeil commencent à régner.

Attirée par un système d’exploitation immobilière à forts revenus potentiels, une délinquance à col blanc s’installe : des agences immobilières aux pratiques douteuses se greffent avec des prêts bancaires aux limites du supportable pour des publics vulnérables qui s’embourbent dans la spirale de l’endettement au moindre accident de la vie. Une délinquance de quartier s’y installe parfois aussi, et le trafic de stupéfiant s’y enkyste.

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La pauvreté n’est pas l’apanage des HLM : 600 000 logements indignes sont répertoriés dans notre pays, et 65 % des ménages vivant sous le seuil de pauvreté habitent le parc privé.

Dans ma ville, Grigny 2 – la plus grande copropriété dégradée du pays avec 5 000 logements et 17 000 habitants – fait l’objet d’une attention particulière de l’Etat au vu de sa concentration de pauvreté. Le 29 janvier 2021, lors du comité interministériel à la ville, le premier ministre, Jean Castex, a annoncé une mesure unique en France : la prise en charge à 100 % de travaux d’urgence et de sécurité pour éviter des drames humains imminents. Deux mois plus tard, la démolition de 920 logements et la transformation de 400 autres en logements sociaux par le rachat des appartements concernés par l’Etat public foncier d’Ile-de-France a également été annoncé. Ce recyclage des copropriétés les plus endettées, jusqu’à 250 % du budget de fonctionnement, est une solution radicale mais qui s’impose, à condition que ce rachat soit à un prix juste pour les copropriétaires occupants. C’est aussi le constat d’un échec : celui d’un système de gestion obsolète et inefficace, de syndics impuissants et d’administrateurs judiciaires incapables de redresser la barre des comptes des copropriétés.

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