les matériaux isolants aussi ont des coups de foudre


L’un des effets secondaires de la récente pandémie de Covid-19 est que la poignée de main et, plus encore, la bise quotidienne, qui avaient complètement déserté nos rapports humains, ne semblent les recoloniser qu’extrêmement timidement, si elles les recolonisent seulement… Or ces contacts brefs, qui la plupart du temps passaient inaperçus, étaient le moment d’interactions et d’échanges discrets et complexes (au-delà des banals pathogènes aériens), aux conséquences parfois incompréhensibles. Etonnamment, cette physique subtile concerne aussi les matériaux inertes et isolants, car tout isolant qu’ils soient, ils échangent par contact des charges (mais pas avec n’importe qui), dans une interaction qui va littéralement jusqu’aux coups de foudre (mais pas n’importe comment).

C’est très précisément le sujet d’un récent article de Nature Physics, dans lequel un coin du voile a été levé avec brio sur une ancienne énigme de la triboélectricité. Le problème concerne l’expérience d’électrification par contact la plus simple qui soit : prenons deux surfaces fabriquées dans des isolants échangeant facilement des charges (dans l’article, le Plexiglas et un élastomère de silicone) dont la propreté et la planéité ont été particulièrement soignées. Il s’agit ensuite de les mettre en contact, de les séparer, et d’utiliser un moyen quelconque pour visualiser la répartition des charges sur chaque surface.

Petits éclairs au voisinage du front de décollement

Dans un monde simple, on s’attendrait à récupérer deux surfaces uniformément chargées, le matériau le plus électrophile (le silicone) se chargeant négativement. Or, depuis les premières expériences vers 1940, quels qu’aient été les dispositifs expérimentaux et les matériaux utilisés, les chercheurs ont systématiquement observé que les charges sont réparties sur chaque surface de façon capricieuse, formant souvent des motifs compliqués dits « mosaïques », avec des alternances de zones chargées positivement et négativement sur une même surface. Ainsi, sur le silicone, malgré une charge totale négative, on trouve de vastes zones de polarité positive.

Faute d’explication plus satisfaisante, diverses inhomogénéités résiduelles microscopiques ont été invoquées pour expliquer ces motifs déroutants. Les chercheurs se sont concentrés cette fois sur le rôle des petits éclairs qui se produisent au voisinage du front de décollement. Un phénomène déjà connu, facile à voir même en décollant un adhésif dans le noir (on a montré que des rayons X sont même émis si l’expérience est faite dans un vide modéré !), mais que personne n’avait songé à relier à la structure en mosaïque des charges déposées…

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