Plus de vingt ans qu’une partie de l’équipe attendait ça : canaliser la foudre à l’aide d’un laser. Entre le 21 juillet et le 30 septembre 2021, au mont Säntis dans l’Alpstein suisse, à plus de 2 000 mètres d’altitude, l’exploit a été réussi par une collaboration de l’Ecole polytechnique, de l’université de Genève, de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et d’ArianeGroup, notamment. Par quatre fois, ils ont tiré et mesuré des différences avec 16 autres coups de foudre tombés durant la période, comme ils l’expliquent dans Nature Physics du 16 janvier.
L’éclair ne s’est pas dispersé en plusieurs branches, mais est resté droit, filant vers la pointe du paratonnerre de 124 mètres. La foudre est aussi tombée plus vite, engendrant plus de rayons X dans l’air. Jusqu’à présent, seules des expériences en laboratoire avaient démontré la domestication de la foudre. Le laser, fabriqué par l’entreprise allemande Trumpf Scientific Lasers pour environ deux millions d’euros, est plus énergétique qu’une version précédemment testée et, surtout, tire cent fois plus par seconde.
Avant de déployer un tel système aux abords d’un aéroport, de sites industriels ou d’installations militaires, il reste de nombreuses améliorations à faire. L’ensemble devra être plus compact et plus facile à mettre en œuvre que les trois heures requises avant chaque session de l’expérience. Augmenter l’énergie permettra d’agrandir le canal qui pourrait dépasser 100 mètres, voire atteindre le kilomètre. Il faudrait aussi augmenter la conductivité du filament pour accroître l’efficacité, mais, pour cela, mieux comprendre les mécanismes à l’œuvre dans le guidage sera nécessaire… De nouvelles demandes de financement sont donc en cours pour retirer sur ce sommet frappé cent fois par an par la foudre. L’espoir est aussi de parvenir à déclencher la foudre avant même les premiers flashs, à la manière des fusées tirant des fils métalliques vers les nuages.