🤢 L’emploi des gaz lacrymogènes est toxique pour la santĂ© et la dĂ©mocratie

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Manifestant pacifiste gazĂ© par les CRS lors d’une manifestation des Gilets Jaunes Ă  Paris, novembre 2018
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Les manifestations qu’elles soient pacifiques ou plus tendues sont souvent contrĂ´lĂ©es et dispersĂ©es par l’usage excessif de gaz lacrymogène. Si ce type de rĂ©pression a l’avantage immĂ©diat de ne pas blesser directement, les gaz Ă©mis sont potentiellement très dangereux pour la santĂ©. Un sujet brĂ»lant lorsque l’on constate que les forces de l’ordre, notamment en France, n’hĂ©site pas Ă  « gazer » les populations, y compris les plus fragiles et ce sans aucun mĂ©nagement, ni discernement.

Le gaz lacrymogène est un composĂ© chimique qui provoque une incapacitĂ© temporaire par irritation des yeux et/ou du système respiratoire. Il s’agit principalement du propane dinitrile[(2-chlorophĂ©nyl)mĂ©thylène] ou CS. Il est utilisĂ© par les forces de l’ordre car considĂ©rĂ© comme faiblement toxique et non lĂ©tal.

Pourtant, les Nations Unies classent le gaz lacrymogène comme une arme chimique, « autorisĂ©e par la Convention sur les armes chimiques Ă  des fins de maintien de l’ordre sur le plan intĂ©rieur » mais « interdit[e] en tant que moyen de guerre. » par la mĂŞme Convention.

L’usage des gaz lacrymogènes en France

Le gaz lacrymogène est utilisĂ© soit en aĂ©rosol (un spray) pour l’auto-dĂ©fense, soit en grenades. Les forces de l’ordre chargĂ©es d’encadrer et de contenir les manifestations en France (CRS notamment) ont de nombreux moyens de rĂ©pression et abusent volontiers des gaz lacrymogène pour intimider, disperser ou faire reculer la foule.

Plusieurs textes de loi prĂ©cisent l’utilisation des gaz lacrymogènes en France. En premier lieu, l’article L-211-9 du code de la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure, qui reprend l’article 431-3 du code pĂ©nal, stipule que « les reprĂ©sentants de la force publique appelĂ©s en vue de dissiper un attroupement peuvent faire directement usage de la force si des violences ou voies de fait sont exercĂ©es contre eux ou s’ils ne peuvent dĂ©fendre autrement le terrain qu’ils occupent ». Le prĂ©fet de police, « tout officier de police judiciaire responsable de la sĂ©curitĂ© publique, ou tout autre officier de police judiciaire », le chef d’unitĂ© sur le terrain, le commandant de CRS ou le capitaine d’escadron de gendarmerie mobile sont habilitĂ©s Ă  prendre la dĂ©cision de recourir aux gaz lacrymogènes.

Malheureusement, l’actualitĂ© de ces dernières annĂ©es soulève de nouveau la question de l’usage abusif de ces gaz sur les personnes. En France, de nombreuses manifestations, y compris locales, et occupations pacifiques sont rĂ©primĂ©es violemment, avec un usage tout Ă  fait disproportionnĂ© de gaz lacrymogène, ceci avec une absence totale de discernement des forces policières envers les plus fragiles.

De très nombreuses manifestations et vidĂ©os tĂ©moignent de cet usage inconsidĂ©rĂ© des gaz lacrymogène et nous citerons quelques exemples, parmi tant d’autres.

Manifestations contre la loi El Khomri, début 2016

Alors que les gouvernements successifs sont incapables de gouverner, le climat social s’est dĂ©tĂ©riorĂ© en France. Ainsi est nĂ©, fin mars 2016, le mouvement Nuit Debout, qui se veut dĂ©mocratique et pacifique : « des assemblĂ©es se forment oĂą les gens discutent et Ă©changent. Chacun se rĂ©approprie la parole et l’espace public. » Ces rassemblements dĂ©mocratiques sont considĂ©rĂ©s par le pouvoir comme une menace et il emploie de plus en plus la force pour y mettre fin.

Ces aspirations citoyennes ont donnĂ© une nouvelle dimension au dĂ©filĂ© du 1er mai 2016. Mais, cela n’a pas empĂŞchĂ© les CRS de provoquer et gazer des manifestants pacifiques.


À Toulouse, les syndicats ont manifesté le 31 mars 2016 contre la réforme du code du travail. Des dizaines de manifestants pacifistes, assis sur un passage piéton, sont soudainement aspergés de gaz lacrymogène par les CRS.

La zone occupée à Notre-Dame-des-Landes sous un brouillard de gaz lacrymogène

La rĂ©pression policière envers les opposants au projet d’aĂ©roport Ă  Notre-Dame-des-Landes a Ă©tĂ© particulièrement violente et les gaz lacrymogènes ont Ă©tĂ© massivement utilisĂ©s (1 400 grenades par jour selon le site desarmons-les, noyant la zone occupĂ©e par les manifestants dans un Ă©pais brouillard toxique, alors que des personnes vivaient sur place.



PlongĂ© dans le brouillard des gaz lacrymogènes, le bocage de Notre-Dame-des-Landes Ă©tait le théâtre vendredi 23 novembre 2012 de scènes de guĂ©rilla rurale entre opposants Ă  l’aĂ©roport et forces de l’ordre, avec des tirs nourris de projectiles de part et d’autre et de fortes explosions.

Les familles Roms gazées et enfermées volontairement

Ce fĂ»t Ă©galement le cas dĂ©but janvier 2013 lorsque plusieurs dizaines de policiers ont saccagĂ© et aspergĂ© de gaz lacrymogène l’un des plus grands squats de Roms de l’agglomĂ©ration lyonnaise Ă  Saint-Fons. Les enfants, nombreux, ont Ă©tĂ© gazĂ©s sans mĂ©nagement, avec leurs mères, parfois mĂŞme en les enfermant de force dans leur logement de fortune, un motif suffisant pour entraĂ®ner la mort.

Cette violence envers les Roms a Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©e par Geneviève Garrigos, prĂ©sidente d’Amnesty International : « La France fait pâle figure au sein de l’Union europĂ©enne et devrait rougir de la manière dont elle traite les Roms, contrairement Ă  ce qu’a pu dire M. Hollande. Elle les enferme dans une spirale de violences, tant dans les propos que dans les actes qui, s’ils ne sont pas condamnĂ©s systĂ©matiquement, pourraient se banaliser.« 

Les anti-corridas gazés à Rodilhan


Manifestants gazés et frappés lors de la manifestation anti-corrida de Rodilhan en octobre 2013

Les familles « bourgeoises » gazées à « La Manif pour Tous »

« La Manif pour Tous », qui « s’oppose Ă  la GPA (mères porteuses), Ă  la PMA pour les couples de femmes, et Ă  l’idĂ©ologie du genre » a Ă©galement subi une rĂ©pression surdimensionnĂ©e. Ainsi, des parents et des enfants ont Ă©tĂ© gazĂ©s sous les rires narquois de certains CRS, alors que la manifestation Ă©tait très « bon enfant » : pas de jet de projectiles, pas de casseurs, pas de bandes mobiles prĂŞtes Ă  en dĂ©coudre… LĂ  encore, l’usage des gaz pose question.


Enfants gazés lors de la manifestation

Les gilets jaunes gazés dans de nombreuses villes de France

L’insurrection populaire des « Gilets Jaunes » qui a dĂ©butĂ© le 17 novembre 2018, est nĂ©e du mĂ©pris du PrĂ©sident Macron pour les classes laborieuses toujours plus asphyxiĂ©es par la fiscalitĂ© et le sentiment de ne pas ĂŞtre Ă©coutĂ©es.

Les rassemblements sur Paris comme en rĂ©gions ont rapidement tournĂ© Ă  l’Ă©meute en partie Ă  cause de l’emploi sans mĂ©nagement et systĂ©matique des gaz lacrymogènes, des grenades de dĂ©sencerclement et des lanceurs de balles de dĂ©fense des attroupements qui n’Ă©taient, Ă  l’origine, pas enclins Ă  la violence.


A Marseille, lundi 3 dĂ©cembre 2018, une femme de 80 ans a succombĂ© Ă  ses blessures Ă  l’hĂ´pital après avoir Ă©tĂ© touchĂ©e au visage par une grenade lacrymogène qui a traversĂ© la fenĂŞtre de son appartement situĂ© au 4e Ă©tage, rapporte le journal La Provence.

Les ambulanciers gazés à Paris

Le 3 décembre 2018, les ambulanciers qui manifestaient pacifiquement (comme en témoignent leurs mains levées) ont été gazés puis matraqués.

La vidéo associée a été supprimée de Youtube

Les enseignants gazés au rectorat de Toulouse

Mardi 19 mars 2019, des enseignants bloquaient le rectorat de Toulouse pour s’opposer aux rĂ©formes « Blanquer ». Ils ont Ă©tĂ© violentĂ©s et gazĂ©s Ă  bout portant sans aucun mĂ©nagement.


Enfants gazés lors de la fête foraine de Nantes

Samedi 6 avril 2019, alors qu’une manifestation de gilets jaunes se disperse, les forces de l’ordre envoient massivement des gaz lacrymogène près de la fĂŞte foraine, les enfants hurlent de douleur, noyĂ©s dans un Ă©pais brouillard.


Ecolos gazés à Paris le 28 juin 2019

Des militants d’Extinction Rebellion effectuent une opĂ©ration non violente de blocage d’un pont Ă  Paris pour dĂ©noncer l’inaction politique face au rĂ©chauffement climatique et l’extinction de la biodiversitĂ©. Ils sont gazĂ©s par les CRS.


Altermondialistes gazés lors du Black Friday 2019

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Altermondialistes gazĂ©s sur un site d’Amazon pour le Black Friday 2019
© Juliette Treillet Photographe – Licence : Tous droits rĂ©servĂ©s

Le 29 novembre 2019, pour protester contre le Black Friday, jour Ă  la gloire de la surconsommation, des altermondialistes ont Ă©tĂ© gazĂ©s Ă  bout portant par les forces de l’ordre alors qu’ils bloquaient sans violence des sites d’Amazon, le gĂ©ant amĂ©ricain notamment dĂ©noncĂ© pour son Ă©vasion fiscale, son gâchis et sa concurrence face Ă  l’Ă©conomie locale et les commerces de proximitĂ©.

Les forces de l’ordre n’ont pas fait preuve de retenue : à » Lyon, l’Ă©vacuation du blocage organisĂ© sur le site de St-Priest s’est fait dans la violence par les policiers prĂ©sents : gifles, coups de pieds, lacrymos, activistes trainĂ©s dans la boue… » dĂ©nonce Attac France.

Acte 56 des gilets jaunes Ă  Toulouse

Le 7 dĂ©cembre 2019 dans le centre ville de Toulouse, les forces de l’ordre font un usage massif et disproportionnĂ© de gaz lacrymogène contre les manifestants « gilets jaunes ».

Enfin, bien d’autres manifestations sporadiques et moins mĂ©diatisĂ©es comme celles des associations de protection de la nature et des animaux, de riverains contre des projets destructeurs de l’environnement, mais aussi des « indignĂ©s » (fin 2011), des « sans logis » (dĂ©but 2012) sont Ă©galement gazĂ©es sans mĂ©nagement.

Journée de mobilisation contre la réforme des retraites du 17 décembre 2019

Sans doute plus d’un million de personnes en France se sont de nouveau mobilisĂ©s contre la rĂ©forme des retraite voulue par la prĂ©sidence Macron au sommet de son impopularitĂ©.

A Nantes, les forces de l’ordre ont repoussĂ© les derniers manifestants Ă  grand renfort de gaz lacrymogène mĂŞme devant la maternitĂ©. ConsĂ©quence : une vingtaine de femmes enceintes et du personnel soignant ont dĂ» ĂŞtre Ă©vacuĂ© en urgence tellement le gaz dense pĂ©nĂ©trait dans les chambres.

Michelle Meunier, SĂ©natrice de la Loire-Atlantique a vivement rĂ©agi sur Twitter, qualifiant cette dĂ©cision de « mise en danger odieuse » et rappelant dans un communiquĂ© l’usage disproportionnĂ© de la rĂ©ponse policière.

Manifestation des pompiers le 28 janvier 2020

Outre la rĂ©pression violente des pompiers (tirs de LBD, matraquage…) dans le cadre de la rĂ©forme des retraites, la police a utilisĂ© massivement des gaz lacrymogène Ă  proximitĂ© des Ă©coles maternelles et primaires Marsoulan Ă  Paris 12e, Ă  l’heure de sortie des Ă©lèves.

Les parents d’Ă©lèves, plusieurs Ă©lus de la Ville de Paris ont interpellĂ© la PrĂ©fecture qui s’est dĂ©douanĂ©e sur les pompiers (RĂ©volution Permanente).

Mayotte : un nourrisson tué par les gaz lacrymogènes

Depuis fin fĂ©vrier 2020, l’Ă®le de Mayotte (territoire français dans l’OcĂ©an Indien) connaĂ®t des troubles suite Ă  la mort d’un homme tuĂ© par un policier.

France Info rĂ©vèle qu’un nourrisson serait dĂ©cĂ©dĂ© vendredi 28 fĂ©vrier Ă  cause des gaz. Dans le lycĂ©e du village de Kahani, « un projectile de gaz est tombĂ© dans une cour oĂą se trouvait une famille. Un nourrisson d’environ trois mois aurait inhalĂ© du gaz lacrymogène. Conduit aux urgences, le bĂ©bĂ© est dĂ©cĂ©dĂ©. Le corps a Ă©tĂ© remis Ă  la famille, l’enterrement a eu lieu en fin de matinĂ©e. « 

Marche des femmes du 8 mars 2020

A Nantes, sur le trajet dĂ©clarĂ© de la marche des femmes, des militantes chantaient avec des enfants Ă  proximitĂ©… Cela n’a pas empĂŞchĂ© la police de les gazer…

La vidéo associée a été supprimée de Facebook

Manifestations contre le passage en force de la réforme des retraites, mars 2023

« Les images de la répression policière des manifestations dénonçant l’utilisation de l’article 49-3 dans le cadre de l’examen d’une réforme qui a suscité une très forte mobilisation depuis plusieurs semaines sont choquantes. Nous avons vu ces scènes indignes d’une démocratie : des policiers exerçant des violences illégitimes contre des manifestants et des street medics, des interpellations collectives de manifestants enjoints de s’assoir par dizaines à terre, mains sur la tête, des journalistes faisant leur métier menacé·es ou brutalisé·es. » (Syndicat de la Magistrature, 20 mars 2023)


Utilisation massive de gaz lacrymogène par les forces de « l’ordre » Ă  Lille, rue Inckermann, le 20 mars 2023.
Vidéo : (R)evol.

Les exactions commises par les forces de « l’ordre » sont très nombreuses. Un exemple parmi tant d’autres : le 20 mars 2023, Ă  Strasbourg les policiers ont bloquĂ© de chaque cĂ´tĂ© des manifestants dans une ruelle, ne laissant aucun Ă©chappatoire. Puis, des grenades lacrymogènes ont Ă©tĂ© lancĂ©es sur la centaine de manifestants, bloquĂ©s. L’air irrespirable a entraĂ®nĂ© 3 malaises sĂ©rieux nĂ©cessitant l’intervention des pompiers. Enfin, un policier a matraquĂ© les manifestants tentant de sortir du nuage de lacrymogène. (La Presse Libre)


A Prades (66), le 23 mars 2023, les forces de l’ordre ont gazĂ© une manifestation familiale tranquille avec des enfants.

La toxicité du gaz lacrymogène

Malheureusement, outre l’incommodation temporaire, les lacrymogènes sont dangereux pour la santĂ© comme le synthĂ©tise le blog Danger-sante.org

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Grenade lacrymogène PLMP 7B ramassĂ©e le 1er dĂ©cembre 2018 lors de l’insurrection populaire des Gilets Jaunes
© JĂ©rĂ©my Verset – Licence : Tous droits rĂ©servĂ©s

En France, les forces de l’ordre utilisent principalement des grenades lacrymogène PLMP 7B, PLMP 7C, MP7, CM6 et CM3. Celles-ci contiennent du 2-chlorobenzylidène malonitrile « CS[1] », le composĂ© chimique appelĂ© gaz lacrymogène qui contient notamment du cyanure.

La fiche technique de l’INRS indique que les effets sur l’Homme les plus connus sont surtout liĂ©s Ă  une exposition aiguĂ« :  » L’effet irritant est le plus net et se manifeste sur l’Ĺ“il (larmoiement, conjonctivite, parfois photophobie), sur la peau, sur le tractus respiratoire (rhinorrhĂ©e, toux, dyspnĂ©e et douleur thoracique) : parfois s’y ajoutent des troubles digestifs (nausĂ©e, vomissement et diarrhĂ©e) et des cĂ©phalĂ©es. Habituellement, ces signes sont rĂ©gressifs en quelques heures ; toutefois, des effets plus prolongĂ©s sur la peau et l’Ĺ“il (kĂ©ratite ponctuĂ©e) ne sont pas impossibles. « 

Les effets du gaz lacrymogène à court terme sur la santé

  • Des problèmes respiratoires, une irritation des voies respiratoires.
  • Des nausĂ©es, voir des vomissements.
  • Des migraines.
  • Une irritation des voies lacrymales et des yeux
  • Des spasmes
  • Des douleurs thoraciques
  • Des dermatites et des allergies

Les consĂ©quences sont accentuĂ©es par temps chaud et humide et semblent de plus en plus difficiles Ă  soutenir lorsque l’exposition est rĂ©gulière.

Une gilet jaune témoigne le 17 décembre 2018 sur Facebook : « Je suis allée à la manifestation samedi à Paris. Et bien évidemment je me suis fais gazé comme une merde alors que je n avais absolument rien fait. Suite à ça samedi soir, j ai commencé à être juste un peu gonflée sous l œil, hier des plaques partout sur le visage et je me lève ce matin je suis un monstre. Gonflée d un côté du visage horrible !!! J ai rendez vous ce soir chez le médecin. Je suis persuadée que C est le gaz car je n ai jamais fait une allergie de ma vie et je précise que j ai 39 ans !!!« 

Les dangers des gaz lacrymogènes à long terme pour la santé

  • Une nĂ©crose des tissus dans les voies respiratoires
  • Une nĂ©crose des tissus dans l’appareil digestif
  • Des Ĺ“dèmes pulmonaires (trou ou bulle d’air dans le ou les poumons)
  • Des hĂ©morragies internes (hĂ©morragies des glandes surrĂ©nales)

Pour la première fois, les effets sur la santĂ© du gaz lacrymogène ont Ă©tĂ© documentĂ©s et dĂ©taillĂ©s dans un rapport de juillet 2020 de l’Association Toxicologie-Chimie de Paris intitulĂ© L’utilisation du gaz lacrymogene cs ses effets toxiques a plus ou moins long terme.
La conclusion est très inquiĂ©tante : « Les effets immĂ©diats sur la santĂ© de l’anion cyanure sont bien documentĂ©s : effets irritants au niveau des yeux, de la peau, du tractus respiratoire, atteinte du système cardio-vasculaire et du système nerveux central (entraĂ®nant des maux de tĂŞte, des Ă©tourdissements, une grande fatigue…). Sur un plus long terme, l’anion cyanure peut aggraver ces atteintes et Ă©galement toucher le système endocrinien (thyroĂŻde). Actuellement, la carcinogĂ©nicitĂ© est encore discutĂ©e, mais des etudes biochimiques laissent Ă  penser qu’il pourrait avoir une activitĂ© mutagène, voire Ă©pigĂ©nitique. De nombreux cas de mortalitĂ© ont Ă©tĂ© dĂ©crits, dont certains rĂ©cents mais ont toujours Ă©tĂ© contestĂ©s ou dissimulĂ©s. »

C’est pourquoi, « avec l’augmentation de l’utilisation du gaz cs lors de manifestations, il devient urgent que les gouvernements faisant usage du gaz cs prennent des dĂ©cisions contraignantes allant dans le sens de la protection de la santĂ© publique, ce qui ne peut aller que dans le sens des recommandations de l’organisation pour l’interdiction des armes chimiques(OIAC) et de certaines organisations non gouvernementales (ONG). » recommandent les docteurs qui ont Ă©tablis ce rapport.

Sur les rĂ©seaux sociaux, en avril 2019, de plus en plus de Gilets Jaunes qui manifestent rĂ©gulièrement se plaignent de consĂ©quences sur leur santĂ© des gaz lacrymogène : migraines, fatigue, maux de ventre, mal de gorge…
Sur Facebook, une jeune femme gilet jaune tĂ©moigne : « Depuis le 16 mars mes cheveux tombent je dors toutes la journĂ©e je n’ai plus de force je me sens mal … et sa s’empire donc j’ai fait un bilan sanguin j’ai vu mon mĂ©decin on pensais que c’Ă©tait le manque de fer ou quelque choses comme ça… mais vu que c’est depuis le 16 mars et j’ai Ă©tĂ© exposĂ© aux gaz lacrymogènes ! Depuis ce jour je me sens mal ! Je les ai reçu aujourd’hui et tout est normal sauf le test du cyanure que j’ai voulu faire et comme vous le voyez … bah voilĂ  pour info je n’ai jamais fumer ni pris quoi que ce soit de ma vie et les fruits je ne mange ni les pepins ni Les noyaux« . Ses rĂ©sultats urinaires montrent une intoxication au cyanure, au-delĂ  des limites acceptables mĂŞme pour un fumeur. D’autres analyses ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es par des gilets jaunes et sont comparables. Il devrait en ĂŞtre autant pour les forces de l’ordre qui sont très exposĂ©es Ă  leurs propres gaz.

Le gaz lacrymogène, une toxicité potentiellement mortelle

Plusieurs Ă©tudes dĂ©montrent la toxicitĂ© importante de ces gaz dans un espace confinĂ© oĂą le dĂ©cès peut survenir. Ainsi, lorsque une personne reçoit des bombes Ă  gaz lacrymogènes Ă  l’intĂ©rieur de son domicile et qu’elle n’arrive pas Ă  sortir Ă  l’extĂ©rieur (cas des personnes âgĂ©es et des bĂ©bĂ©s), elle risque de perdre la vie assez rapidement.

C’est typiquement le cas qui aurait pu se produire lors de cette scène d’un autre temps rapportĂ©e par le webzine Basta, dĂ©but janvier 2013, dans le camp de Roms Ă  Saint-Fons : « Sandu est seul dans sa cabane. « J’Ă©tais en train de me laver. Un policer est rentrĂ©, quand il m’a vu, il a lancĂ© du gaz lacrymogène Ă  hauteur de mon visage et il a refermĂ© la porte. Quand j’ai voulu sortir, je n’ai pas pu. Il bloquait la porte et m’empĂŞchait de sortir. J’ai cru que j’allais mourir. » »

Cette issue qui aurait pu être fatale, aurait été due soit à une atteinte pulmonaire et/ou une asphyxie.

Les effets à long terme de ces gaz lacrymogène sont de 3 types :

  • l’effet mutagène et donc cancĂ©rigène des produits.
  • l’effet tĂ©ratogène : les femmes enceintes risquent donc d’avoir des enfants avec des malformations.
  • l’effet nĂ©crosant : une pneumopathologie chronique peut malheureusement s’installer et devenir irrĂ©versible.

Les populations les plus fragiles (bĂ©bĂ©s, jeunes enfants, personnes âgĂ©es) sont très sensibles Ă  ces gaz toxiques, ainsi que les insuffisants rĂ©naux[2]. Ils peuvent dĂ©velopper une syndrome de dysfonctionnement respiratoire rĂ©actif. Ce syndrome ainsi que la bronchopneumonie et un oedème pulmonaire peuvent s’installer dĂ©finitivement. On peut Ă©galement assister aussi Ă  une fièvre persistante.

Ce n’est pas tout, les gaz lacrymogènes peuvent Ă©galement dĂ©velopper des douleurs abdominales et Ă  des diarrhĂ©es. Le foie peut subir une atteinte nĂ©crosante importante de type stĂ©atose. Un oedème cĂ©rĂ©bral peut Ă©galement apparaĂ®tre.

Enfin n’oublions pas de souligner que les forces de l’ordre (principalement les CRS et gendarmes mobiles) sont rĂ©gulièrement exposĂ©es aux gaz lacrymogène qu’ils utilisent, Ă  cause de leurs entraĂ®nements, du vent pas toujours favorable et des renvois par les manifestants.

Des gaz incapacitants utilisés contre les gilets jaunes

Lucie, 35 ans, aide-soignante dans une clinique tĂ©moigne sur l’usage d’un gaz incapacitant lors de la manifestation des Gilets Jaunes du 16 mars 2019 :
« Samedi dernier j’Ă©tais sur les Champs ElysĂ©es avec mon ami (…) on Ă©tait coincĂ© : des barrages de flics nous empĂŞchaient d’aller vers le Louvre ou Orsay. On Ă©tait nassĂ© ! Et lĂ , pour la première fois de ma vie, j’ai Ă©tĂ© atteinte par un gaz spĂ©cial. J’en ai fait des manifs, je sais de quoi je parle…Une grenade est tombĂ©e Ă  mes pieds et j’ai Ă©tĂ© recouverte d’une poudre grise. ImmĂ©diatement j’ai suffoquĂ©, je ne pouvais plus respirer, mais plus grave, je ne tenais plus sur mes jambes, tout mon corps tremblait, je n’avais plus de coordination dans mes mouvements. Je suis tombĂ©e comme un lĂ©gume. Tous les gens autour de moi tombaient aussi. Nos membres Ă©taient tout flasques (…) C’est un gaz innervant, ça touche le système nerveux ! Dès que je l’ai respirĂ©, je me suis mise Ă  chialer, j’ai Ă©tĂ© prise de panique, je n’avais plus aucun contrĂ´le sur mes rĂ©actions psychologiques. J’avais peur de tout et de tout le monde. Les flics me terrorisaient, et mĂŞme mon copain me faisait flipper…Le mĂ©decin de l’hĂ´pital qui m’a soignĂ©e m’a confirmĂ© que c’Ă©tait un gaz toxique qu’on utilise par temps de guerre et qui a des consĂ©quences psychologiques ; il paralyse le système nerveux, Ă©motionnellement on n’est plus maĂ®tre de soi. Je ne pouvais mĂŞme plus contrĂ´ler mon envie de faire pipi ! Pendant plusieurs jours je faisais sur moi, j’Ă©tais devenue incontinente comme une vieille de 80 ans (…) Impossible d’aller manifester. Mes camarades de Juvisy qui ont aussi Ă©tĂ© touchĂ©s par ce gaz ne sont pas venus aujourd’hui. Peut-ĂŞtre qu’ils ne reviendront jamais. Ce gaz te fout une trouille d’enfer ! Le psychiatre de l’hosto l’a constatĂ©. Et puis j’ai crachĂ© du sang pendant cinq jours ; j’avais les poumons en feu ! Les infirmiers radiologues n’avaient jamais vu ça ! »

L’usage de ce gaz incapacitant lors de l’acte 18 des Gilets Jaunes a Ă©tĂ© confirmĂ© par la PrĂ©fecture de police sollicitĂ©e par CheckNews : les forces de l’ordre ont utilisĂ©, pour la première fois, de la poudre lacrymogène. Selon une source du Parisien au sein du ministère de l’IntĂ©rieur, celle-ci est « plus concentrĂ©e, plus incapacitante » que la formule classique, rapporte Sputnik.

Et les grenades explosives ?

Plus grave encore : la France est le seul pays en Europe Ă  utiliser des grenades explosives lors des manifestations. On peut facilement les entendre, elles produisent :

  • une dĂ©flagration localisĂ©e qui peut mutiler ou tuer ;
  • une Ă©mission de gaz lacrymogène ;
  • et un bruit très dangereux pour la santĂ© (165 dĂ©cibels dans un rayon de cinq mètres).


Cette grenade explosive c’est la GLI-F4.

Alors que plusieurs personnes ont Ă©tĂ© mutilĂ©es par ces grenades, les stocks de GLI-F4 ne sont plus renouvelĂ©s, « il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de ne plus fabriquer de cette grenade », a expliquĂ© le ministère de l’IntĂ©rieur. Cette grenade a Ă©tĂ© utilisĂ©e massivement jusqu’Ă  Ă©puisement des stocks.


DĂ©monstration de la puissance d’une grenade GLI-F4

Depuis janvier 2020, la GLI-F4 est remplacĂ©e par la GM2L (Grenade Modulaire Ă  Double effet Lacrymogène), une grenade assourdissante et lacrymogène qui n’a pas d’effet de souffle mais qui est bien plus puissante : « l’explosif qui est dans la GM2L est 1,6 fois plus puissant que celui de la GLI-F4. Ce sont des armes de guerre« , s’insurge le neurochirurgien Laurent Thinès. En effet, la GM2L contient du C4, un explosif militaire.

2 manifestants en ont déjà fait les frais lors de la Marche Des Libertés (une manifestation qui dénonçait le projet de Loi « Sécurité globale ») du 5 décembre 2020 à Paris et lors d’une Free Party à Redon en juin 2021. Ces deux personnes ont eu leur main mutilée (doigts arrachés).

La France emploie de plus en plus de gaz lacrymogène

Le 10 novembre 2022, le Ministère de l’IntĂ©rieur lançait le plus gros appel d’offre de « grenades de maintien de l’ordre et accessoires destinĂ©s aux services de la police nationale et de la gendarmerie nationale ». Cet appel d’offre concerne entre 4,5 et 13,4 millions de grenades de tous types pour les 4 annĂ©es Ă  venir ; budget total : 38 millions d’euro.
L’appel d’offre comprend des grenades lacrymogènes de deux types :

  • celles, connues de tous les manifestants, de 56 millimètres et 40 millimètres, qui jonchent le sol après les manifestations, et qui peuvent ĂŞtre tirĂ©es jusqu’à 200 mètres, pour 9,44 millions d’unitĂ©s.
  • L’autre lot est celui des grenades explosives, les nouvelles GM2L.

Encore pire en novembre 2023 alors que la France achetait un nouveau stock de 78 millions d’euro de grenades lacrymogènes ! En seulement un an, le précédent stock de 2022 a été utilisé pendant les manifestations contre la réforme des retraites et les émeutes de juillet suite au meurtre de Nahel.

78 millions d’euro, c’est la plus importante commande de grenades de maintien de l’ordre en plus de dix ans. Elle comprend des grenades lacrymogènes, mais aussi des explosives et assourdissantes, dont certaines jamais encore employĂ©es…

La France rappelĂ©e Ă  l’ordre par l’ONU et la Ligue des droits de l’Homme

L’emploi des gaz lacrymogène n’est pas anodin et particulièrement inacceptable lorsqu’il est sciemment projetĂ© contre des personnes fragiles et pacifiques, ce qui est assez frĂ©quent dans les manifestations, alors mĂŞme que la loi ne l’autorise pas.

L’usage de ces moyens de rĂ©pression excessifs participe Ă  la fracture de plus en plus profonde entre les forces de l’ordre et les citoyens qui expriment leur mĂ©contentement sur des sujets de sociĂ©tĂ©. Alors que nos politiques sont prompts Ă  lancer des appels au calme et Ă  affirmer que la violence ne rĂ©sout rien, force est de constater qu’ils l’utilisent volontiers pour rĂ©gler les conflits sociaux qui les dĂ©rangent.

A l’heure oĂą la France rĂ©gresse sur la dĂ©mocratie[3], ce recours quasi systĂ©matique Ă  des armes chimiques contre la population, y compris les plus fragiles, est tout Ă  fait inacceptable. Un constat qui fait peine Ă  voir dans le pays qui se gargarise d’ĂŞtre le berceau des droits de l’Homme…

L’emploi des lacrymogènes est tellement massif et rĂ©gulier en France que le rĂ©gime en place est qualifiĂ© de « lacrymocratie ».
D’ailleurs, « La police aurait dispersĂ© les foules Ă  l’aide de gaz lacrymogène et de grenades de dĂ©sencerclement, munitions que la France est le seul pays europĂ©en Ă  utiliser lors d’opĂ©rations de maintien de l’ordre », dĂ©nonce un communiquĂ© du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) du 15 juin 2023 qui demande Ă  la France de « respecter et promouvoir le droit de rĂ©union pacifique ».

Les experts de l’ONU ajoutent : « Le manque de retenue dans l’usage de la force Ă  l’encontre des membres de la sociĂ©tĂ© civile qui revendiquent de manière pacifique leur participation aux processus dĂ©cisionnels concernant leur avenir, l’accès aux ressources naturelles, la protection des droits humains, la dignitĂ© et l’égalitĂ©, serait non seulement anti-dĂ©mocratique, mais profondĂ©ment inquiĂ©tant pour l’État de droit », ont dĂ©clarĂ© les experts. « Nous appelons les autoritĂ©s Ă  entreprendre un examen complet de leurs stratĂ©gies et pratiques en matière de maintien de l’ordre afin de permettre aux manifestants d’exprimer leurs prĂ©occupations et Ă  faciliter une rĂ©solution pacifique des conflits sociaux. », ont ajoutĂ© les experts.

« L’arsenal des forces de l’ordre françaises est l’un des plus fournis et contestĂ©s en Europe, c’est pourquoi la LDH demande sa rĂ©vision, et notamment sous les plus brefs dĂ©lais l’interdiction des techniques d’immobilisation mortelles & des armes de guerre. » a demandĂ© la Ligue des Droits de l’Homme le 1er avril 2023.

Notes

  1. Les initiales « CS » proviennent de Corson et Stoughton, les deux chimistes qui ont synthétisé la molécule.
  2. Ces gaz toxiques sont rapidement absorbés par voie pulmonaire. Une grande partie est hydrolysée puis éliminée par les reins dans les urines.
  3. Absence de la reprĂ©sentation proportionnelle Ă  l’AssemblĂ©e nationale, quasiment aucun rĂ©fĂ©rendum, corruption et mensonges des Ă©lites, entrave aux votes des dĂ©putĂ©s, exercice de nombreux Ă©lus pourtant condamnĂ©s, justice partiale, PrĂ©sident de la RĂ©publique Ă©lu par une minoritĂ©, nĂ©potisme, libertĂ© d’expression muselĂ©e et remise en cause, restrictions des libertĂ©s publiques, assignations Ă  rĂ©sidence, manifestations interdites, Ă©tat d’urgence prolongĂ©, surveillance gĂ©nĂ©ralisĂ©e des communications web, loi sur les fake news, censure des mĂ©dias…

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