🩊 La rĂ©gulation des espĂšces « nuisibles » n’a aucun fondement scientifique


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A la demande de la LPO et de l’ASPAS, la Fondation pour la recherche sur la biodiversitĂ© (FRB) a constituĂ© un comitĂ© d’experts indĂ©pendants afin de rĂ©aliser une synthĂšse et une analyse des connaissances disponibles dans la littĂ©rature scientifique, qui montre l’inefficience des destructions d’EspĂšces susceptibles d’occasionner des dĂ©gĂąts (ESOD) sur la rĂ©duction des dommages qui leur sont imputĂ©s

Dans son rapport « Les prĂ©lĂšvements des EspĂšces susceptibles d’occasionner des dĂ©gĂąts (Esod) rĂ©duisent-ils les dĂ©gĂąts qui leur sont imputĂ©s ? » publiĂ© le 26 septembre 2023, le comitĂ© note les points suivants :

  • Il existe une grande lacune de connaissance sur l’effet des Ă©liminations d’ESOD sur les dĂ©gĂąts agricoles ou privĂ©s. En l’absence de telles donnĂ©es, le classement ESOD des espĂšces incriminĂ©es n’a aucun fondement scientifique.
  •     Recourir aux abattages d’ESOD de maniĂšre systĂ©matique apparaĂźt ĂȘtre une solution peu efficace pour rĂ©duire les dĂ©gĂąts. D’autres mesures existent et pourraient ĂȘtre mises en place.
  • Le dĂ©clin des espĂšces communes, mĂȘme localement et en faible proportion, perturbe la structure et le fonctionnement des Ă©cosystĂšmes naturels. Les dĂ©gĂąts associĂ©s aux ESOD devraient ĂȘtre mis en balance avec les bĂ©nĂ©fices Ă©cologiques apportĂ©s par ces espĂšces.
  • Dans les rares cas oĂč elles ont fait l’objet d’une Ă©valuation scientifique indĂ©pendante, les Ă©conomies dues aux dĂ©gĂąts Ă©vitĂ©s par la mise en place de prĂ©lĂšvements se sont rĂ©vĂ©lĂ©es moins importantes que les dĂ©penses induites par ces mĂȘmes prĂ©lĂšvements.

La conclusion des scientifiques est sans appel : « DĂ©truire des ĂȘtres vivants, a fortiori dans un contexte de dĂ©clin de la biodiversitĂ©, devrait ĂȘtre justifiĂ© par l’urgence Ă  agir pour empĂȘcher un dĂ©gĂąt jugĂ© grave par des critĂšres objectifs et mesurables, par l’absence de mesures alternatives, et par une preuve de l’efficacitĂ© de la destruction. » Ces conditions n’Ă©tant pas rĂ©unies, les experts recommandent un changement de paradigme afin d’aboutir Ă  des mesures proportionnĂ©es et vĂ©ritablement utiles.

Action juridique contre l’Etat français

Cette Ă©tude de la FRB conforte notre plaidoyer pour demander la rĂ©vision de l’arrĂȘtĂ© triennal du 3 aoĂ»t 2023 fixant la liste des ESOD du groupe 2 (Belette d’Europe, Fouine, Martre des pins, Renard roux, Corbeau freux, Corneille noire, Pie bavarde, Geai des chĂȘnes, Étourneau sansonnet) pour chaque dĂ©partement de 2023 Ă  2026. En dĂ©pit d’une opposition citoyenne massive lors de la consultation publique, 71% des 49 000 avis exprimĂ©s Ă©tant contre l’arrĂȘtĂ©, ce dernier a Ă©tĂ© publiĂ© dans sa version initiale par le MinistĂšre de la transition Ă©cologique.

La LPO et l’ASPAS ont ainsi dĂ©posĂ© des recours juridiques auprĂšs du Conseil d’Etat et contestent 161 classements ESOD dĂ©partementaux sur les 420 Ă©tablis par le MinistĂšre de l’Ă©cologie en France mĂ©tropolitaine, dont la totalitĂ© pour le renard (88), le geai (5) et la belette (1). La dĂ©cision sur le fond est attendue dans 1 Ă  2 ans.

Dans son projet de stratĂ©gie nationale pour la biodiversitĂ© 2030 dĂ©voilĂ© le 20 juillet 2023, le gouvernement a par ailleurs annoncĂ© des rĂ©flexions pour une meilleure efficacitĂ© de la rĂ©gulation des ESOD au regard des couts engendrĂ©s. La prise en compte de ces Ă©tudes est annoncĂ©e en 2026 pour les mammifĂšres et en 2029 pour les oiseaux. Pourquoi ne pas suspendre dĂšs aujourd’hui l’abattage massif de ces espĂšces afin d’Ă©tudier l’impact de l’absence de rĂ©gulation sur les dĂ©gĂąts constatĂ©s ?

Pour Allain Bougrain Dubourg, PrĂ©sident de la LPO : « Ce rapport de la FRB Ă©claire, pour la premiĂšre fois, un dĂ©bat obscurci par les mauvaises habitudes. On sait dĂ©sormais que la destruction systĂ©matique des ESOD est Ă  la fois injuste et inefficace. Alors que la biodiversitĂ© connait un effondrement dramatique, il est inacceptable de perpĂ©tuer le massacre. Puisque le gouvernement refuse d’Ă©couter la science, nous nous en remettons donc Ă  la justice. »
Pour Marc Giraud, porte-parole de l’ASPAS : « Depuis 40 ans que l’ASPAS lutte pour la rĂ©habilitation des renards et autres mal-aimĂ©s, nous savons Ă  quel point le monde de la chasse se rĂ©vĂšle nĂ©gationniste de la science, faisant pression sous tous les prĂ©textes pour prĂ©server ce loisir sanglant qui ressemble si peu Ă  une mission d’intĂ©rĂȘt public.  Aujourd’hui, ce rapport de la FRB consolide tout ce que les associations ont maintes fois dĂ©noncĂ©. Mais comme le gouvernement prĂ©fĂšre Ă©couter la voix des lobbies, c’est devant le Conseil d’État que le sort de millions d’animaux se jouera. »


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