Quand la Terre était une boule de neige entièrement recouverte de glace

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Vue d’artiste d’une « Terre de boule de neige » tapissée de glaciers.
Auteur : NASA – Licence : DR

La planète Terre n’a pas toujours eu un climat clément pour l’émancipation de la vie. L’histoire géologique de la Terre est marquée à plusieurs reprises par d’intenses glaciations généralisées qui ont littéralement transformé la Terre en « boule de neige » entièrement recouverte de glaciers. Les scientifiques tentent de comprendre comment ces épisodes se sont mis en place et dans quelle mesure ils pourraient revenir.

Il y a 700 millions d’années, la Terre connaissait un climat glaciaire extrême. « Imaginez que la Terre soit presque complètement gelée », a déclaré le Dr Adriana Dutkiewicz. « La planète était recouverte de glace des pôles à l’équateur et les températures ont chuté. ».
Cette période glaciaire prolongée, également appelée glaciation sturtienne d’après l’explorateur colonial européen du centre de l’Australie du XIXe siècle, Charles Sturt, s’est étendue de 717 à 660 millions d’années, une période bien avant l’existence des dinosaures et de la vie végétale complexe sur terre, sans que l’on comprenne encore les causes.

Une étude publiée dans le journal Geology en février 2024 tente d’y voir plus clair. Des géologues australiens ont utilisé la modélisation de la tectonique des plaques pour déterminer ce qui a le plus probablement causé ce climat glaciaire planétaire dans l’histoire de la Terre qui a perduré pendant… 57 millions d’années !

Pourquoi la Terre est devenue une « boule de neige » il y a 700 millions d’années ?

D’après leurs recherches, cet état aurait pu être causé par des « des émissions historiquement faibles de dioxyde de carbone volcanique, aidées par l’altération d’un grand tas de roches volcaniques dans ce qui est aujourd’hui le Canada ; un processus qui absorbe le dioxyde de carbone atmosphérique. » précise Adriana Dutkiewicz. En effet, « à cette époque, il n’y avait pas d’animaux multicellulaires ni de plantes terrestres sur Terre. La concentration de gaz à effet de serre de l’atmosphère était presque entièrement dictée par le dégazage du CO2 des volcans et par les processus d’altération des roches silicatées, qui consomment le CO2 ». Rappelons que les systèmes volcaniques restent d’importants contributeurs aux émissions de CO2 dans l’atmosphère.

L’effet de serre, engendré principalement par le dioxyde de carbone (CO2) est bénéfique pour la vie sur Terre car il permet de maintenir des températures bien plus chaudes à la surface du globe, mais en trop forte quantité il devient néfaste, c’est un équilibre à préserver.
Sur Mars où l’atmosphère est tenue et donc l’effet de serre absent, la température moyenne est de – 50°C. Sur Vénus, où l’atmosphère est très chargée en gaz carbonique, la température moyenne est de + 420°C.

Ce projet a été inspiré par les débris glaciaires laissés par la glaciation ancienne de cette période, qui peuvent encore être observés dans les Flinders Ranges, une chaîne montagneuse située dans le sud de l’Australie, dans l’État d’Australie-Méridionale en Australie du Sud.
Un récent voyage géologique dans cette régions, dirigé par le co-auteur de l’étude, le professeur Alan Collins de l’Université d’Adélaïde, a incité l’équipe à utiliser les modèles informatiques EarthByte de l’Université de Sydney pour étudier la cause et la durée exceptionnellement longue de cette période glaciaire.

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Chaîne montagneuse Flinders Range, Australie
© Zombaba – Licence : Pixabay

Le co-auteur, le professeur Dietmar Müller de l’Université de Sydney, explique : « La géologie a régné sur le climat à cette époque. Nous pensons que la période glaciaire sturtienne a été déclenchée par un double coup dur : une réorganisation de la tectonique des plaques a réduit le dégazage volcanique à un minimum, tandis qu’en même temps, une province volcanique continentale au Canada a commencé à s’éroder, consommant le CO2 atmosphérique. Le résultat a été que le CO2 atmosphérique est tombé à un niveau où la glaciation se déclenche – que nous estimons être inférieur à 200 parties par million, soit moins de la moitié du niveau actuel ».

Les concentrations actuelles en CO2 dans l’atmosphère sont de 420 ppm.

La Terre a été plusieurs fois une « boule de neige »

Cette période glaciale sur Terre (à ne pas confondre avec les périodes glaciaires bien plus limitées dans le temps et la géographie) n’est pas la seule dans l’histoire géologique de la Terre. Il y a environ 2,4 à 2,2 milliards d’années, au cours de l’ère du Paléoprotérozoïque, la Terre était déjà une boule de neige lors d’une période appelée « glaciation huronienne » en référence à la région des Grands Lacs en Amérique du Nord où de nombreuses preuves géologiques de cette glaciation ont été trouvées.

L’apparition de la vie sur Terre (il y a environ 3,5 milliards d’années) a entraîné la libération d’une quantité croissante d’oxygène, ce qui a entraîné l’oxydation de l’atmosphère. De ce fait, le soufre rejeté par les volcans n’a plus été transformé en oxysulfure de carbone mais en aérosols sulfatés, ce qui aurait pu entraîner le refroidissement de la Terre et la transformer en boule de neige.

En effet, en 2009, des chimistes de l’université de Copenhague, au Danemark et de l’institut de technologie de Tokyo, au Japon, ont découvert qu’un gaz à effet de serre, l’oxysulfure de carbone (COS), dégagé par des millénaires d’activité volcanique, a évité à la Terre de se congeler totalement, alors que le Soleil était 30 % moins chaud qu’actuellement.
« L’oxysulfure de carbone est vraiment le summum en matière de gaz à effet de serre. Il est bien plus efficace que le dioxyde de carbone », expliquait alors le professeur Matthew S. Johnson, du département de chimie de l’université de Copenhague. « Nous estimons qu’une couverture de ce gaz aurait retenu environ 30 % d’énergie en plus à la surface de la planète, compensant ce qui manquait au Soleil ».

Le professeur Johnson et ses collègues ont réalisé un modèle informatique de l’atmosphère ancienne qui, associé à des expériences en laboratoire, a montré que la diminution de COS et l’augmentation des aérosols sulfatés ont conduit à la Terre « boule de neige », une glaciation totale de la planète il y a 2,4 à 2,2 milliards d’années.

La Terre va-t-elle redevenir une « boule de neige » ?

Ces travaux soulèvent des questions intrigantes sur l’avenir à long terme de la Terre. A ce titre, une théorie récente a proposé que au cours des 250 prochains millions d’années, la Terre évoluerait vers Pangea Ultima, un supercontinent si chaud que les mammifères pourraient s’éteindre.

Cependant, la Terre est également actuellement sur une trajectoire de réduction des émissions de CO2 volcanique, à mesure que les collisions continentales augmentent et que les plaques ralentissent. Ainsi, peut-être que notre planète se transformera à nouveau en boule de neige.

« Quel que soit l’avenir, il est important de noter que le changement climatique géologique, étudié ici, se produit extrêmement lentement. Selon la NASA, le changement climatique d’origine humaine se produit dix fois plus rapidement que ce que nous avons vu auparavant » avertit le Dr Dutkiewicz.


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