🩈 La surpĂȘche pousse les requins et les raies au bord de l’extinction

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Raie léopard (Aetobatus_narinari)
© Mark Rosenstein – Licence : CC BY-NC-SA

Une nouvelle Ă©tude mondiale confirme le risque croissant d’extinction pour les requins et les raies des profondeurs.

Les requins et les raies des profondeurs font partie des vertĂ©brĂ©s marins les plus sensibles Ă  la surexploitation, principalement Ă  cause de la pĂȘche. « Les requins et les raies des profondeurs sont recherchĂ©s pour leur viande et leur huile de foie« , dĂ©clare Dr Brittany Finucci, une scientifique halieutique basĂ©e Ă  l’Institut national de recherche sur l’eau et l’atmosphĂšre (NIWA) en Nouvelle-ZĂ©lande. « Bien que ces pĂȘcheries ne soient pas nouvelles, l’expansion et la diversification mondiales de l’utilisation et du commerce des requins et des raies des profondeurs sont prĂ©occupantes.« 

Les requins et les raies des profondeurs (poissons chondrichtyens avec les chimĂšres) passent la majeure partie de leur vie Ă  des profondeurs supĂ©rieures Ă  200 mĂštres. Or, ils figurent parmi les espĂšces de vertĂ©brĂ©s marins les plus vulnĂ©rables Ă  la surexploitation en raison de leur longue durĂ©e de vie et de leurs faibles taux de reproduction. Par exemple, le Requin du Groenland et le Squale-chagrin de l’Atlantique ont des taux de croissance de population respectivement comparables Ă  ceux du cachalot et du morse.

La classe des chondrichtyens comprend trois grandes lignĂ©es : les requins, les raies et les chimĂšres (un groupe relativement petit constituĂ© principalement d’espĂšces des profondeurs). Les chondrichtyens constituent la plus ancienne et la plus grande radiation Ă©volutive de vertĂ©brĂ©s et l’une des trois classes taxonomiques de poissons. PrĂšs de la moitiĂ© (45 %) de la diversitĂ© mondiale de tous les requins et raies se trouve dans les profondeurs de l’OcĂ©an.

Ainsi, les Chondrichtyens sont particuliĂšrement sensibles Ă  la surpĂȘche car leur croissance est lente et leur fĂ©conditĂ© est faible.

Les requins et les raies sont recherchĂ©s pour leur viande, leur peau, leur huile (pour le biodiesel, les cosmĂ©tiques, les adjuvants dans les vaccins), leurs ailerons, leurs plaques branchiales et pour le loisir (pĂȘche et plongĂ©e).

C’est pourquoi, « la plupart des requins et raies des profondeurs ne peuvent seulement supporter qu’une pression de pĂȘche trĂšs faible« , explique Dr Nicholas Dulvy, professeur Ă  l’UniversitĂ© Simon Fraser au Canada. « Certaines espĂšces peuvent mettre 30 ans ou plus pour atteindre leur maturitĂ©, et jusqu’à 150 ans pour le Requin du Groenland, et ne produisent que 12 petits pendant toute leur vie. En raison de leur grande taille et de leur distribution Ă©tendue, les requins et les raies des profondeurs jouent un rĂŽle Ă©cologique vital en concentrant et en dispersant les nutriments dans les habitats ocĂ©aniques profonds.« 

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Requins des profondeurs tuĂ©s dans une pĂȘcherie d’huile de foie de requin d’eau profonde au large des cĂŽtes du LibĂ©ria
Auteur : Melissa Romao / Sea Shepherd – Licence : DR

Depuis les annĂ©es 1990, la conservation des requins et des raies est de plus en plus prise en compte au sein des organismes rĂ©gionaux de pĂȘche (y compris les Organisations RĂ©gionales de Gestion des PĂȘches) et des traitĂ©s internationaux sur la faune sauvage, en particulier la Convention sur le commerce international des espĂšces de faune et de flore sauvages menacĂ©es d’extinction (CITES). Par le biais de diverses actions associĂ©es visant principalement Ă  mettre fin Ă  la surexploitation des espĂšces menacĂ©es, les gouvernements des États membres sont tenus de limiter la pĂȘche et/ou les exportations Ă  des niveaux durables, mais le bilan du respect de ces engagements a Ă©tĂ© gĂ©nĂ©ralement mĂ©diocre jusqu’Ă  prĂ©sent. À ce jour, les requins et les raies des profondeurs sont encore largement ignorĂ©s.

Une nouvelle Ă©tude a Ă©tĂ© menĂ©e dans le cadre du Global Shark Trends Project (GSTP), une collaboration entre le Groupe spĂ©cialisĂ© sur les requins de l’UICN, l’UniversitĂ© Simon Fraser, l’UniversitĂ© James Cook et l’Aquarium de GĂ©orgie, avec le soutien du Shark Conservation Fund, afin d’Ă©valuer le risque d’extinction des poissons chondrichtyens. L’analyse sur huit ans a impliquĂ© 322 experts du monde entier.

Cette Ă©tude a Ă©valuĂ© 521 espĂšces, classant 60 (11,5 %, plus de deux fois plus que lors du rapport de 2014) dans les catĂ©gories menacĂ©es de l’UICN, soit En danger critique d’extinction (9 espĂšces), En danger (20 espĂšces) ou VulnĂ©rable (31 espĂšces). En considĂ©rant que les espĂšces avec des donnĂ©es insuffisantes sont menacĂ©es dans la mĂȘme proportion que les espĂšces Ă©valuĂ©es, la statistique augmente Ă  une sur sept menacĂ©e (14,1 %). Le site web de la liste rouge de l’UICN utilise la valeur la plus Ă©levĂ©e pour exprimer le risque d’extinction Ă  l’Ă©chelle mondiale. Deux tiers des espĂšces (323 espĂšces) sont classĂ©s en PrĂ©occupation mineure, et 43 espĂšces sont Quasi menacĂ©es.

Au final, un requin ou raie des profondeurs sur sept est menacĂ© d’extinction, selon les critĂšres de la Liste Rouge des espĂšces menacĂ©es de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Une Ă©quipe d’experts mondiaux souligne que la principale menace pour ce groupe appartenant Ă  la mĂ©gafaune des profondeurs est la surpĂȘche, et en particulier leur capture en tant que prises accessoires dans les pĂȘcheries ciblant des espĂšces commercialement importantes.

Dr Rima Jabado, vice-prĂ©sidente de la Commission pour la sauvegarde des espĂšces de l’UICN et prĂ©sidente du Groupe spĂ©cialisĂ© sur les requins de l’UICN, souligne que « les rĂ©sultats de notre Ă©tude mettent en Ă©vidence la nĂ©cessitĂ© de rĂ©guler le commerce de l’huile de foie. Bien qu’il y ait eu un succĂšs significatif dans la rĂ©gulation du commerce des ailerons de requin, des rĂ©glementations spĂ©cifiques pour les requins et les raies des profondeurs sont nĂ©cessaires de toute urgence. Cela pourrait inclure des protections nationales, des rĂ©glementations sur les pĂȘcheries en eaux profondes, ainsi que l’inscription d’espĂšces Ă  l’Annexe II de la Convention sur le commerce international des espĂšces de faune et de flore sauvages menacĂ©es d’extinction (CITES). Les requins et les raies des profondeurs ont Ă©tĂ© nĂ©gligĂ©s pendant trop longtemps. Il est maintenant temps d’agir pour empĂȘcher une aggravation de la menace actuelle.« 

Rappelons que trois espÚces de chondrichtyens sont désormais considérées comme « probablement éteintes » :

  • La raie pastenague de Java (Urolophus javanicus) n’a pas Ă©tĂ© observĂ©e depuis 1908.
  • La raie torpille de la mer Rouge (Torpedo suessii) n’a pas Ă©tĂ© observĂ©e depuis 1934.
  • Le requin perdu (Carcharhinus obsolerus) n’a pas Ă©tĂ© observĂ© depuis 1934.

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© Dr Lindsay Marshall Nicholas K. Dulvy et al. Current Biology, 2021 – Licence : Tous droits rĂ©servĂ©s

Les quatre familles de Chondrichtyens les plus menacées sont :

  • les poissons-scies ;
  • les grandes raies-guitares ;
  • les diables de mer
  • et les raies aigles pĂ©lagiques.

Il existe actuellement une initiative mondiale appelĂ©e 30×30 qui vise Ă  protĂ©ger 30 % de l’OcĂ©an d’ici 2030.
Cette nouvelle Ă©tude montre que la protection de 30 % des profondeurs entre 200 et 2 000 mĂštres fournirait une protection spatiale partielle pour environ 80% des espĂšces Ă  travers leur aire de rĂ©partition. Si une interdiction mondiale de la pĂȘche en dessous de 800 mĂštres Ă©tait mise en place, cela offrirait un refuge vertical de 30 % pour un tiers (27 %) des requins et raies des profondeurs qui sont menacĂ©s.


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